Les artistes s’effacent, leurs écrits restent

Il y a quelques années, j’ai rencontré un slameur talentueux. Tomtom était un conteur hors pair, un poète, un homme d’une grande sensibilité. Nous avons fait plus ample connaissance, partagé quelques scènes ouvertes, de simples repas, des séances de cinéma. Des moments joyeux, plein d’humour, à deux ou avec d’autres amis. Plus tard, il m’a confié son passé douloureux, sa dépendance à la drogue, parcours qu’il a raconté dans un livre : Au fil du temps. Dans cet ouvrage, il mêle témoignage et textes poétiques. Lorsque nous nous sommes rencontrés, il ne consommait plus et tentait de vivre normalement. Difficile.

Grâce à lui j’ai découvert le calvaire des personnes toxicomanes et de leur entourage. Le sujet reste tabou parce qu’il nous fait peur. Thomas était un ami adorable qui, comme souvent dans les cas de grande dépendance, a fait souffrir des proches qui le soutenaient. Puis il a malheureusement rencontré des personnes qui l’ont fait replonger. Je l’ai vu sombrer, s’accrocher, tenter de remonter. Comment soutenir un ami qui vit de telles épreuves ? L’addiction est un ennemi puissant. Le manque et les overdoses ont failli l’emporter plusieurs fois. Récemment, il a tenté de nouveau de mettre fin à ses jours. Cette fois ce n’était pas un appel au secours. Il était désespéré et il a réussi à passer de l’autre côté.

Les écrits qu’il nous laisse permettent de mieux comprendre son acte. Mais comment accepter son choix ? Chacun fera son deuil. Thomas aimait chanter et danser, en équilibre sur le fil de la vie. Me manqueront ses chansons, son sourire, son amitié.

Je me permets de retranscrire ici les premiers mots du prélude de son livre :
« On traverse la vie comme on marche sur une plage, à la frontière entre la terre que l’on foule et l’infini de l’océan que l’on devine, au cœur des mystères que l’on imagine. La trajectoire de nos vies, fragile, éphémère, se dessine ici. En équilibre sur le sable fin, elle inscrit dans les traces de nos pas, celles que les vagues viendront invariablement effacer… »

La suite de cette introduction était porteuse d’espoir. L’écriture lui a fait beaucoup de bien. Il aurait aimé s’en sortir.

Tu as finalement décidé de t’effacer, Thomas, mais je ne t’oublierai pas. Repose en paix.

https://www.facebook.com/les.textes.a.toto

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