« L’inspiration de nos héritages » /8/

Il y a un an, Gino Balocco a découvert le moringa, une plante consommée traditionnellement en Afrique et en Asie. Depuis, Takouma a été créée pour distribuer des produits à base de moringa.

Gino revient sur cette aventure et partage avec l’énergie de la plume les rencontres qui l’ont inspiré pour concrétiser ce projet.

Une oasis en plein désert

Le projet de commercialiser des produits à base de moringa a germé dans l’esprit de Gino Balocco lorsqu’il a rencontré Éric Toumieux, cofondateur de Beer Shéba, au Sénégal. Ce programme d’agroforesterie durable et de permaculture est aussi un centre de formation créé en 2012, ouvert aux fermiers africains qui souhaitent développer des projets similaires dans leur pays.

« J’avais vu un reportage séduisant et j’avais envie de vérifier si les choses étaient aussi réussies dans la réalité. Lors d’une rencontre en France en décembre 2019, Éric m’a proposé de venir voir sur place. Trois semaines plus tard, je visitais avec mon épouse les cent hectares de cette incroyable oasis perdue au milieu du désert. Le résultat était bien plus impressionnant que l’émission ne le laissait imaginer ! Il y a quelques années, la zone était fertile mais les activités humaines et le réchauffement climatique ont désertifié la région. En arrivant sur le site on a l’impression d’entrer dans un décor de cinéma ! Il ne s’agit pourtant pas d’un trompe l’œil, on passe du désert à une végétation luxuriante. Des arbres et des fleurs poussent autour de vaches qui mangent de l’herbe. De nombreuses espèces d’oiseaux et des singes évoluent dans ce milieu inattendu aux allures de parc zoologique. Tout cela existe grâce aux soins de l’équipe de Beer Shéba. » L’évocation fait évidemment penser au projet Instituto Terra, initié par Sebastião Salgado au Brésil (Cf. Le Sel de la Terre, réalisé par Wim Wenders) ou aux expériences menées par Pierre Rhabi.

Le commerce au profit du développement

Interrogeant l’équipe de Beer Shéba sur ce qui pourrait permettre au projet de se développer, Gino projette de commercialiser la poudre et l’huile de moringa. Il réunit un groupe d’amis aux compétences complémentaires et ils mettent en ligne en été 2020 le site www.takouma.com. « L’équipe de Takouma a investi le budget nécessaire au lancement de l’activité et a bénéficié du temps libre offert par le confinement pour concrétiser le projet. Nous ne visons pas la réussite financière à tout prix. L’objectif est de générer un chiffre d’affaires suffisant pour pérenniser le projet mais dans le respect de nos valeurs et de notre but : faire du bien à soi, aux autres et à la planète. »

Le moringa est une plante appréciée pour ses bienfaits pour la santé. La distribution de ce type de produit implique une vigilance qui n’a pas échappée à Solstice, la coopérative d’entrepreneurs qui accompagne Takouma depuis le printemps 2020. « Le référencement du site et les modalités de paiement en ligne ont également exigé des justifications légitimes. Il convient donc de rappeler que le moringa est un aliment. Ce n’est ni un médicament, ni un complément alimentaire selon la nomenclature en vigueur. Cependant, c’est un ingrédient reconnu par la pharmacopée traditionnelle de nombreux pays d’Afrique et des études scientifiques ont été réalisées pour analyser ses vertus. »

À la suite d’expériences humanitaires dans les pays du sud, Gino avait envie de soutenir les populations locales. « J’avais également une bonne connaissance du marketing et du management, et le commerce équitable me semblait une piste de développement intéressante. Les personnes impliquées dans Beer Shéba ont le sens de la Terre et des Hommes. Selon eux, « on n’est pas propriétaire de la terre mais on a un devoir de la gérer correctement ». Ils ont une vision globale, ils pratiquent la permaculture et l’agriculture régénératrice. Ils s’inspirent d’une technique d’élevage qui permet de se passer d’antibiotiques pour soigner les animaux. Le fumier est composté et utilisé pour fertiliser les sols. Ils ont refusé le label bio car la certification impose que les animaux soient vaccinés pour que les déjections soient utilisées dans les cultures. Cette absence de labellisation freine certains partenariats en France avec des fabricants de glaces, de bières, etc. Cependant le projet séduit et Takouma bénéficie de soutiens indispensables. Par exemple, une entreprise d’insertion de personnes en situation de handicap, Dream Solutions,  dirigée par Armelle Lapierre, gère la réception des matières premières, leur conditionnement et leur distribution. »

L’esprit d’entreprendre

Le parcours professionnel de Gino Balocco l’a amené à tisser des liens entre l’humanitaire et le social d’un côté, et le monde de l’entreprise de l’autre. « Takouma utilise les outils de l’entreprise pour atteindre un objectif humanitaire et social. La rencontre de l’équipe de Beer Shéba au Sénégal a été déterminante lorsque j’ai constaté qu’ils n’ont pas envie de dépendre de subventions mais qu’ils cherchent à préserver leur indépendance financière et à maintenir leur autonomie. Je trouve que c’est une bonne vision du développement, portée par Eric Toumieux, un homme très inspirant. Lorsque je l’ai rencontré, j’ai immédiatement eu envie de le côtoyer davantage. Il a suivi une formation en école de management et a travaillé dans la finance internationale en Suisse avant de créer Beer Shéba. Il met ses compétences de manager au service de cette ferme et c’est un homme plein d’humanité et d’humilité. Il considère chacun au même niveau dans l’équipe et s’implique personnellement dans la gestion au quotidien. Les formations agricoles incluent d’ailleurs un volet entrepreneurial pour que les stagiaires pérennisent leur activité. »

Des inspirations généreuses

L’autre source d’inspiration de Gino est la foi chrétienne. « La foi prend tout son sens lorsqu’elle nous pousse à faire des choses positives. Je trouve les actions collectives plus épanouissantes que les projets égocentrés. Faisant partie des 10% les mieux nantis de la population mondiale, j’estime avoir une responsabilité vis à vis des 90% restants. Cela me motive à agir pour les autres et à partager ce que j’ai reçu, comme Sœur Emmanuelle qui incarnait parfaitement cette idée en agissant auprès des plus démunis. Une autre personne m’inspire particulièrement, Jean-Marc Semoulin, une sorte de doux rêveur qui monte des projets un peu fou comme le salon de l’humanitaire que nous avions organisé ensemble à Paris. Une initiative l’occupe actuellement aux Mureaux avec le PTCE (Pôle Territorial de Coopération Économique) : atteindre 0% de chômage et faire des Mureaux une ville touristique ! Cela peut faire sourire mais Jean-Marc n’a peur de rien et je suis convaincu qu’il parviendra à réaliser ce pari. Il transforme chaque inconvénient en avantage. Il ne cherche jamais son intérêt. C’est une personne qui prend tous les risques, une vraie locomotive qui peut entrainer de nombreux wagons ! »

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